Spéléologie en papouasie : Iowa 2014, forêt vierge équatoriale et cavités mythiquesPapouasie - Massif de Nakanaï

Iowa 2014 est une expédition nationale de la Fédération Française de Spéléologie qui s'inscrit dans l'exploration du massif des Nakanaï en Papouasie. Menée par une équipe aguerrie, la prospection spéléo en forêt vierge équatoriale primaire a permis la découverte de plusieurs cavités mythiques telles que Naré, Kavakuna, Minyé, Wowo et Muruk.

Spéléologie en papouasie : Iowa 2014, une expédition entre rêve et réalité

Nourrir les rêves…

L'expédition Iowa 2014 se termine à peine, le contraste en est saisissant entre la vie en forêt et le retour à son chez soi si confortable. La dernière partie de l'équipe est encore à Kokopo afin de gérer le stock de matériel que nous allons laisser sur place pour les prochaines aventures.

Le mot "expédition" est de nos jours souvent galvaudé et utilisé (à mauvais escient) à toutes les sauces… Pour nous, c'est partir explorer un milieu naturel inconnu, rencontrer des populations locales, c'est une immersion totale dans un milieu naturel difficile où l'homme n'a normalement pas sa place. Les papous ne connaissent pas les gouffres de leurs montagnes et les générations actuelles n'étaient jamais allées aussi loin et haut sur le massif. Ils sont étonnés de notre témérité et de l'énergie que nous déployons pour trouver des gouffres, tailler des sentiers, installer des camps et aller toujours plus loin sous terre. Nos quatre amis porteurs ont dit être fiers de partager cette aventure avec nous, ils sont aussi curieux de nous que nous le sommes d'eux et de leur univers.

Si là-haut la vie est une survie, la forêt n'en est pas moins fascinante. C'est l'une des dernières forêts primaires de notre planète avec toute la richesse de la biodiversité que cela sous-entend. Ces forêts sont rares de nos jours et, selon des botanistes reconnus, elles risquent de disparaitre de notre planète d'ici six ans si rien n'est fait pour les protéger… En Papouasie, le danger vient des loggeurs Malais attirés par la richesse des bois précieux du massif. Les zones de coupe avancent à grand pas d'une année sur l'autre…

Iowa 2014 était une reconnaissance, la première approche sur ce massif. Nous n'en connaissions que Wara Kalap, la superbe résurgence de 5 m3 en bord de mer. Une prospection plus précise les premiers jours a permis de localiser d'autres résurgences. En fait ce sont plus de 2 m3/seconde qui sortent de ce massif en différents endroits ! Un débit incroyable qui laisse rêveurs les spéléologues que nous sommes.

Après le rêve, place à l'action !

Le premier camp a été rapidement installé à 400 m d'altitude, au-dessus de la résurgence. Dès notre arrivée, les papous nous montrent un petit trou souffleur juste en contrebas. Son courant d'air nous nargue, il prouve qu'un réseau important passe là, juste sous nos pieds. Nous l'avons agrandi avec les moyens du bord à temps perdu, sans pouvoir finalement passer, trop étroit. De petites équipes sont parties en prospection en remontant sur le massif dans différentes directions. Les premières entrées intéressantes ont été découvertes au-delà de 600 m d'altitude et à plusieurs heures de marche du camp de base.

-50 m, -80 m, -100 m… les gouffres sont très nombreux mais rapidement bouchés, il s'avère difficile de pénétrer ce massif. Un sentier a été taillé jusqu'à 1000 m d'altitude, à 6 km à vol d'oiseau du camp de base. Un long travail à la machette pour installer un nouveau camp dans l'espoir de meilleurs résultats. Suivent trois semaines avec les mêmes conclusions décevantes : bouché, terminé. Du coup, certains ont essayé de passer dans des cavités étroites, forçant les passages dans l'espoir de déboucher enfin sur "du gros". En Papouasie ces passages étroits sont dangereux, un orage important peut les ennoyer, mettant en danger les équipes. Les 300 m de profondeur sont atteints mais les dimensions ne sont pas à la hauteur de nos espérances et toujours pas de rivière souterraine.

Dans le même temps, des découvertes archéologiques majeures sont faites dans l'un des gouffres, notamment une belle hache en silex taillé. Un témoignage fort des anciennes populations papous dans ces montagnes. Le temps file et les hommes souffrent, nous avons tous des problèmes de santé plus ou moins sérieux : mycoses, blessures, ulcères tropicaux, piqures infectées… On comprend pourquoi les papous ne vivent pas là-haut de nos jours. Faire de la spéléo en Papouasie suppose de pouvoir supporter ces conditions de vie, une hygiène rudimentaire, l'humidité permanente et éviter les milles occasions de se faire mal tant sous terre qu'à l'extérieur. Le spéléologue doit ici se doubler d'un baroudeur rustique !

Dernière semaine !

Deux nouvelles entrées sont découvertes à une heure de marche du camp des 1000, une fois le sentier taillé. Les entrées sont petites, insignifiantes mais… dans la première un courant d'air aspirant laisse présager d'un développement important, l'autre cavité prend vite de belles dimensions et on devine la suite filer vers les profondeurs dans un large et haut méandre. La motivation remonte et les explorations commencent. Au retour dans la nuit les sourires illuminent les visages, ça continue. Pas encore très large mais on y croit. On entend un actif derrière un passage étroit, quelques coups de marteau suffiront pour passer. 300 m de profondeur à nouveau et de nombreuses galeries fossiles à explorer. Des bivouacs pour gagner du temps permettent de descendre jusqu'à une grande salle au-delà de 500 m de profondeur, le développement topographique dépasse les 2 km. Enfin de beaux résultats !

Dans le second gouffre, nommé Philip Pato, en hommage à un de nos anciens porteurs décédé, les équipes s'enfoncent et suivent un actif qui grossit au fur et à mesure de nos pas. À 500 m de profondeur, on débouche enfin dans une vraie galerie papou : 15 à 20 m de large et autant en hauteur. La rivière cascade et nous amène jusqu'à un siphon à près de 600 m de profondeur. Bab et Guillaume passent ce verrou noyé de 3 m de long, derrière la galerie continue. La joie est cependant de courte durée, 50 m plus loin un nouveau siphon stoppe définitivement les explorations pour cette année. Au final, le repérage sur ce massif ramène des résultats exceptionnels et laisse présager du potentiel futur. Philip Pato cave est déjà le 3e gouffre le plus profond de Papouasie. Cédric et moi avons tourné plusieurs heures de vidéo de cette belle aventure et un film est en prévision d'ici l'automne. À suivre !

Merci à nos partenaires pour leur soutien dans cette aventure : FFS, Petzl, Aquatab, Aventure Verticale, Béal, CDS Ariège, CDS Ardèche, CDS Paris, les clubs de Figeac, de Souillac et des Goulus.

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